Kate Newby, anything anything, 2024, installation en briques d’argile « Lumière » avec inclusions de matériaux divers, 50 mètres de long, Klosterruine, Berlin/DE.

Comptant plus de 900 briques, anything anything de Kate Newby se déploie en deux rangées courbes de 50 mètres de long chacune, intégrées au sol du monastère berlinois. Deux lignes qui évoquent un parcours liturgique disparu au sein du Klosterruine désaffecté, cette architecture gothique datée du XIIIe siècle. Une structure en brique locale qui englobe des éléments d’un édifice encore antérieur. Cette composition s’attèle à une appréhension du lieu comme sujet à d’inévitables évolutions. Un travail phénoménologique qui s’intéresse à la modification des perceptions, d’appréhension de l’architecture, permis par une œuvre qui oscille entre apparition et disparition.

Ici, l’artiste néo-zélandaise renouvelle sa collaboration avec les ateliers français Rairies Montrieux. Une coopération qui s’explique par l’héritage artisanal que Kate Newby revendique dans sa pratique. Ils ont produit des briques « Lumière », un mélange laiteux réalisé à partir de quatre types d’argiles et cuit au four à bois. Ce modèle pyramidal est généralement utilisé pour la réalisation de façades. Un format uniformisé, produit à la chaîne auquel l’artiste se confronte : elle grave, sculpte, remodèle, rendant chaque brique singulière. Des motifs dans la matière et autres inclusions colorées qui lui ont été inspirés par l’observation de l’environnement urbain et de ses altérations, spécifiquement le vieillissement de la brique. Son travail sculptural minutieux se révèle dans les détails, selon une approche particulière qui rappelle les perspectives post-minimalistes.

Avec anything anything, Klosterruine est pensé comme un lieu de rencontre entre l’histoire et la production contemporaine. Un projet qui illustre une sédimentation, une fusion, à la fois de la matérialité et des temporalités. L’installation est semblable à des topographies miniatures, qui interagissent avec l’environnement, s’activent au gré de la nature : la pluie qui s’infiltre, les feuilles prisent dans ses tranchées, la poussière qui s’y coince… Kate Newby réfléchit l’espace comme un écosystème, posant un cadre social et culturel. Elle appuie cette idée de partage avec la production de cartes postales en édition limitée, distribuées librement aux spectateurs qui participent à la régénération de ces ruines.