Ask the Animals, and They Will Teach You, 2021. Polyester et technique mixte / Polyester and mixed media,, éd. 2/3, Hangar Y, Meudon/FR, 2024

« ADORER LE CAMÉLÉON

Le caméléon est une espèce ancienne de reptile qui vit sur Terre depuis environ 100 millions d’années.

De nombreux caméléons ont la capacité de changer de couleur pour exprimer leur état d’esprit ou pour communiquer.

Les caméléons ont un champ de vision de 360 degrés et grâce à leur langue balistique, ils peuvent attraper les proies les plus lourdes avec une vitesse de 0 à 95 kilomètres en 1/100e de seconde. »

—Jeremy Deller.

Ask the Animals, and They Will Teach You illustre une réflexion sur la culture populaire et la culture scientifique avec l’approche ludique et didactique propre au travail de Jeremy Deller. L’artiste conçoit cette œuvre comme une structure de jeu où les enfants sont invités à se laisser glisser sur la langue-toboggan du caméléon. Les enjeux écologiques sous-tendent discrètement ce monument qui nous invite à penser la mémoire collective des espèces en danger sur le modèle des héros historiques. Aux abords du Hangar Y, l’animal démesuré retrouve sa place au cœur de la forêt, mais cette fois-ci, en tant qu’œuvre d’art participative.

Une première version de Ask The Animals and They Will Teach You a également été installée sur la place Van Bunnenplein, à Knokke-Heist en Belgique, dans le cadre de la Triennale d’art contemporain Beaufort 21.

Experience #10 – 2012/2013.

A l’occasion du 10e anniversaire d' »Expériences Pommery »
Commissaire : Bernard Blistène, directeur du département du développement culturel du Centre Pompidou.

« Faire chic avec du cheap »

Pour cette exposition, Richard Fauguet réemploie et assemble des opalines chinées. Tirant partie de la transparence vitreuse du verre et de leur forme, l’artiste métamorphose ces objets du quotidien devenus désuets en luminaires exceptionnels.

Plus d’informations

Kate Newby, anything anything, 2024, installation en briques d’argile « Lumière » avec inclusions de matériaux divers, 50 mètres de long, Klosterruine, Berlin/DE.

Comptant plus de 900 briques, anything anything de Kate Newby se déploie en deux rangées courbes de 50 mètres de long chacune, intégrées au sol du monastère berlinois. Deux lignes qui évoquent un parcours liturgique disparu au sein du Klosterruine désaffecté, cette architecture gothique datée du XIIIe siècle. Une structure en brique locale qui englobe des éléments d’un édifice encore antérieur. Cette composition s’attèle à une appréhension du lieu comme sujet à d’inévitables évolutions. Un travail phénoménologique qui s’intéresse à la modification des perceptions, d’appréhension de l’architecture, permis par une œuvre qui oscille entre apparition et disparition.

Ici, l’artiste néo-zélandaise renouvelle sa collaboration avec les ateliers français Rairies Montrieux. Une coopération qui s’explique par l’héritage artisanal que Kate Newby revendique dans sa pratique. Ils ont produit des briques « Lumière », un mélange laiteux réalisé à partir de quatre types d’argiles et cuit au four à bois. Ce modèle pyramidal est généralement utilisé pour la réalisation de façades. Un format uniformisé, produit à la chaîne auquel l’artiste se confronte : elle grave, sculpte, remodèle, rendant chaque brique singulière. Des motifs dans la matière et autres inclusions colorées qui lui ont été inspirés par l’observation de l’environnement urbain et de ses altérations, spécifiquement le vieillissement de la brique. Son travail sculptural minutieux se révèle dans les détails, selon une approche particulière qui rappelle les perspectives post-minimalistes.

Avec anything anything, Klosterruine est pensé comme un lieu de rencontre entre l’histoire et la production contemporaine. Un projet qui illustre une sédimentation, une fusion, à la fois de la matérialité et des temporalités. L’installation est semblable à des topographies miniatures, qui interagissent avec l’environnement, s’activent au gré de la nature : la pluie qui s’infiltre, les feuilles prisent dans ses tranchées, la poussière qui s’y coince… Kate Newby réfléchit l’espace comme un écosystème, posant un cadre social et culturel. Elle appuie cette idée de partage avec la production de cartes postales en édition limitée, distribuées librement aux spectateurs qui participent à la régénération de ces ruines.

Kate Newby, The edge of earth, 2022, sculptures en briques et mortier, dimensions variables, produit avec le soutien de Rairies Montrieux, présenté sur le parvis du Palais de Tokyo lors de l’exposition collective Réclamer la terre, 2022, Paris/FR. Photo Aurélien Mole.

Réclamer la terre se présente comme un programme qui explore la relation entre le corps et la terre. Une exposition qui s’emploie à réfléchir la place de l’individu dans son environnement, mais aussi l’y replacer. Il s’agit de matérialiser cette « communauté du sol », développée par Rachel Carson, pionnière de l’écologie et autrice de Printemps silencieux (1962).

Dans ce contexte, Kate Newby présente The edge of earth sur le parvis du Palais de Tokyo, ou plutôt « dans » le parvis. L’artiste néo-zélandaise investit les interstices architecturaux délaissés, quelques carrés de terre inutilisés. Elle propose 5 compositions in situ, en briques, prises dans l’architecture sans la dénaturer. Par des matériaux ordinaires, Kate Newby se réclame d’un héritage artisanal, comme l’illustre cette collaboration avec les Ateliers Rairies-Montrieux, où elle travaille la matière avec son corps.

Ces créations subtiles soulignent une attention minimaliste qui s’épanouit dans le détail, les traitements de surface. L’approche des volumes révèle des réflexions internes à la sculpture, ici, travaillée en creux plutôt qu’en élévation. Des sillons et trous qui auraient pu être l’œuvre d’un animal ou d’insectes dans la terre. Une certaine poésie du quotidien transparaît, magnifiant des altérations qui rappellent celles du bitume, soumis à l’usure, aux éléments, aux aléas du climat.

Un ensemble qui évoque également la lente création topographique, modelage des masses dans la terre comme dans cette argile figée. The edge of earth apparaît comme autant de paysages miniaturisés, de jardins minéraux : des contrepoints organiques à la rigidité géométrique de cette architecture. Un jeu de courbes et contre-courbes, sanctionné par l’orthogonalité des briques, qui résonne avec l’usage du parvis par les jeunes skaters, intégrant pleinement cet environnement tant physique que social.

Kate Newby, « You wish. You wish. », 2022, carreaux de verre teinté au jaune d’argent, 33 x 33cm chaque, produit avec les Ateliers Loire, inclus dans la porte du Palais de Tokyo lors de l’exposition collective « Réclamer la terre », 2022, Paris/FR. Photo Aurélien Mole.

En parallèle, Kate Newby investit avec discrétion l’entrée du Palais de Tokyo, selon une continuité formelle et conceptuelle. You wish. You wish.  est une proposition entre installation, artisanat et architecture : quelques carreaux de verre, teintés au jaune d’argent, sont répartis sur la porte monumentale de l’institution. L’œuvre ne se révèle véritablement qu’à la fermeture du Palais, alors que la lumière filtre au travers de ces vitraux singuliers.

Avec ce projet, l’artiste collabore avec les Ateliers Loire de Chartres, héritiers d’un savoir-faire technique et artisanal remarquable. Ici encore, on retrouve un attrait pour l’altération sublimée, la valorisation du rebut : des trous, des déformations et « malfaçons » volontaires qui compromettent la fonctionnalité des vitraux et contrebalance la virtuosité des maîtres verriers.

Pour Réclamer la terre, Kate Newby illustre un rapport à l’environnement qui tient de la symbiose, de l’unité. Une production qui s’insère dans un écosystème plutôt que de s’y imposer, et dont la matérialité, l’argile et le verre, renvoie à une filiation plus en phase avec la nature. 

Roman Signer, Le Pendule, 2009, installation, 7 mètres de haut, Trentemoult, Rezé, Estuaire de Nantes/FR. 

Dans les environs de Nantes, l’estuaire de la Loire est aussi aujourd’hui un centre d’art contemporain à ciel ouvert. Une collection qui s’est constituée suivant un programme de commandes publiques et l’organisation de plusieurs biennales, dans le cadre d’une stratégie culturelle qui vise à revaloriser cet ancien site de pêche, devenue une zone industrielle délaissée. 

Avec Le Pendule, Roman Signer revalorise une usine désaffectée, une œuvre qui s’inscrit dans un intérêt particulier pour les espaces marginaux. Cette centrale à béton avait pour fonction d’extraire le sable de la Loire et de le transformer afin de réaliser des infrastructures. Sa fonction transformatrice rappelle la dimension expérimentale de la pratique de l‘artiste. La forme complexe de l’édifice abandonné, son artificialité, contraste fortement avec l’épaisse végétation environnant. Un géant écarlate en métal s’est endormi dans un coin de verdure. 

L’artiste suisse réalise un pendule noir de 7 mètres, fixé à la façade de l’édifice. Une extension qui se balance inlassablement. Cette intervention, à la fois minimale et monumentale, illustre le vocabulaire plastique caractéristique de Signer. Le Pendule n’est pas une horloge classique. Son balancement marque la lente déchéance du bâtiment, le cycle des marées et l’écoulement du fleuve. Ce temps qui attaque l’usine et semble laisser la nature reprendre ses droits. L’oscillation infatigable, comme un tic-tac de rappel, renforce le sentiment d’une disparition inéluctable. 

Le Pendule a été réalisé pour Estuaire 2009 dans le cadre de la commande publique du Ministère de la Culture et de la Communication DRAC des Pays de la Loire, avec le concours de Pro Helvetia, fondation suisse pour la culture. Remerciements à Point P.