2021
Jeremy Deller
Father and Son, 2021, Saint Saviour’s Church of Exiles, Collingwood, Melbourne/AU.

Jeremy Deller, Father and Son, 6 novembre 2021, installation sculpturale consumable, cire, bois, mèche et flamme, grandeur nature, commande de l’ACCA, Saint Saviour’s Church of Exiles, Collingwood, Melbourne/AU. 

Father and Son est une installation de Jeremy Deller commandée par l’Australian Centre for Contemporary Art (ACCA). Le 6 novembre 2021, une veille publique mettait en scène la consumation de l’œuvre en cire pendant 12 heures. L’événement était filmé et diffusé en temps réel sur le site de l’ACCA. Une version miniature de la sculpture-bougie y était également en vente.

Father and Son illustre parfaitement la dimension sociale de l’approche artistique de Jeremy Deller. L’œuvre est présentée comme une représentation archétypale de la figure paternelle accompagnée de sa progéniture masculine. Pourtant, les deux hommes ressemblent étrangement à Rupert et Lachlan Murdoch, à la tête d’une longue lignée de magnats des médias australiens. L’artiste aborde la question de l’héritage, de la filiation, et invite à réfléchir les dynamiques de pouvoir sous le prisme générationnel et institutionnel.

La Bible s’impose comme la référence principale de l’artiste britannique qui mentionne spécifiquement le verset 5 :19 de l’Evangile selon saint Jean : « Ce que fait le Père, le Fils le fait pareillement ». Le choix du lieu de l’événement – une église désacralisée de Melbourne – souligne le caractère subversif de la pensée de Jeremy Deller, pour qui musées et églises sont des espaces singuliers et interchangeables où les limites entre sacré et profane sont brouillées. Un décor qui renvoie inévitablement aux dynamiques patriarcales qui s’exercent non seulement dans le Christianisme, mais également dans les autres sphères de notre société : politique, médias, travail… 

Le traitement plastique de Father and Son laisse apparaître l’influence des sculptures baroques espagnoles. Un héritage qu’il adapte à des codes anciens et contemporains, du portrait de famille au portrait d’entreprise, souvent pensé comme support de légitimation dans le contexte de dynastie d’entrepreneurs. Cette œuvre qui brûle et s’auto-détruit peut alors être considérée comme une sorte de vanité ou de memento mori politiquement engagé.